Histoire De Collectionneur: Camille Vergnes

Camille Vergnes se souvient encore de sa première trouvaille vintage : une jupe en velours imprimé jungle Kenzo, qu'elle avait achetée dans une petite boutique pendant sa pause déjeuner au lycée. « La jupe était trop grande pour moi, alors je l'enroulais autour de la taille pour l’ajuster, dit-elle. C'était tellement drôle. »

Néanmoins, l'achat a donné naissance à une vraie histoire d'amour avec tout ce qui est d'occasion. Aujourd'hui, l'architecte d'intérieur parisienne porte des bijoux anciens Boivin et Yves Saint Laurent des années 1970, et décore de la même manière les maisons de ses clients avec des meubles d'occasion, principalement des années 20 et 30. « J'adore la quête », déclare Camille Vergnes. « La pièce vous trouve, ou vous trouvez la pièce, et là se passe un petit moment magique. C'est un peu poétique, comme tomber amoureux.»

Ci-dessous, Vergnes discute de ses trouvailles préférées et partage ses meilleurs conseils pour démarrer votre propre collection vintage.

Comment êtes-vous venue à la décoration d'intérieur?

Je pense que mon obsession a commencé lorsque ma mère a hérité de la ferme de mon arrière-grand-mère. Mes parents ont décidé de tout refaire, mais ils avaient toujours quelque chose à changer ou à travailler, alors j'ai passé mon enfance dans une maison en devenir. Je pense que ma passion vient un peu de cette frustration, mais cela m'a aussi donné l'occasion de me demander : que ferais-je si c'était la mienne ? Cela a stimulé ma créativité. Jusqu'à il y a cinq ans, je travaillais dans l'hôtellerie de luxe, mais j'ai décidé de changer de vie et de me concentrer sur la recherche de clients. Maintenant, je travaille surtout avec des meubles des années 1920, 1930 et du début du XXe siècle pour le style Sécession viennoise.

Comment décririez-vous votre style?

Mon style est de mélanger. C'est vraiment un dialogue entre les différents mouvements que j'aime – un peu de Sécession viennoise, un peu d'Art Déco. En matière de vêtements, mon style est féminin et masculin, il y a toujours une opposition. Je porte beaucoup de chemises en soie et de pantalons taille haute des années 20, 30 et 70. J'aime aussi les vêtements épurés et architecturés, c'est pourquoi j'aime Alaïa et parfois un peu Mugler ou Céline. Je suis toujours à la recherche de beaux tissus. Et il faut que ce soit confortable. Pour moi, les pantalons taille haute sont aussi confortables que les leggings. Ma garde-robe est principalement composée de basiques simples, raffinés et bien ajustés avec une pièce unique, comme des bijoux ou une cape folle des années 70.

Pourquoi êtes-vous attirée par le vintage?

Pour moi, ces dernières années, personne n'a fait quelque chose de mieux ou qui corresponde davantage à mon style. C'est pourquoi je ne suis pas un designer de meubles et juste une architecte d'intérieur. Si j'avais une idée pour quelque chose qui avait l'air mieux, je grandirais et créerais de nouvelles choses, mais je ne pense pas que quiconque ait fait mieux - ou puisse faire mieux.

Quel est votre processus pour trouver des pièces?

Je vais dans beaucoup de ventes aux enchères et de galeries, et, parfois, si je sais que j'aurai un peu de temps libre et que je veux profiter de ma journée, je vais visiter un magasin vintage et j'attends juste de tomber amoureuse.

Si je travaille pour mes clients, je fais un moodboard. Je sélectionne chaque pièce en même temps afin que toutes les pièces fonctionnent ensemble et créent un bel ensemble. Mon travail est de créer un dialogue artistique entre les pièces que je sélectionne, donc j'aime tout choisir en même temps, mais je ne m'applique pas toujours cette règle car je veux tomber amoureuse des pièces au fil du temps — c'est plus une évolution et je la construis.

Je collectionne aussi les livres anciens. Si j'ai besoin d'un livre qui n'est plus imprimé, je le dis à Stéphane, mon adorable vendeur à la Librairie des Archives à Paris. Il connaît mon esthétique et les décennies que je préfère, alors il me prévient dès qu'il a quelque chose qui correspond à mes intérêts, comme un catalogue de meubles viennois des années 20. C'est bien d'avoir le catalogue car on peut alors identifier une pièce qui n'est pas signée. J'aime voir tous les modèles.

Que collectionnez-vous maintenant?

Je collectionne surtout les vêtements et les bijoux, notamment les bijoux Boivin des années 20 et 30. L'esthétique des années 20 est vraiment ce que j'aime. C'est délicat, raffiné, et il y a toujours une originalité, que ce soit dans le choix de la pierre ou de l'échelle.

Je collectionne moins les meubles car dès que je vois une très belle pièce importante je l'offre toujours à mes clients en premier. D'habitude, parce que j’en suis amoureuse, je la vends si bien qu'ils finissent par l'acheter. Les clients d'abord, moi ensuite. Cela dit, j'ai commencé à collectionner un peu pour moi il y a cinq ans lorsque j'ai eu un espace assez grand pour accueillir de belles pièces, comme une armoire Burlwood Art Déco et un canapé Edward Wormley dont je rêvais depuis des années.

Je collectionne l'argenterie, la vaisselle en ivoire (l'ivoire est protégé maintenant, donc je m'assure toujours qu'il est d'origine des années 20 et 30), et tout ce qui a des pompons, que ce soit des rideaux ou un sac ou une ceinture Yves Saint Laurent des années 1970. J'aime particulièrement les toutes petites boîtes, que je range par couleur. Vous ne pouvez rien mettre à l'intérieur, mais elles prennent en fait beaucoup de place. Pourtant, c'est tellement satisfaisant de les avoir. C'est comme ça qu'on construit une collection : on est juste attiré et on ne sait pas pourquoi. Vous ne pouvez rien y faire. Une amie m'a dit qu'un jour elle prendra mes cendres et les mettra dans des toutes petites boîtes.

Quelles sont vos règles en matière de collection?

Vous devez faire des choix rationnels. Si vous voulez vraiment être un vrai collectionneur, vous devez prendre en compte énormément de choses, comme la rareté et la qualité de la pièce. Pour commencer une collection saine, il faut s'assurer de ne pas payer trop cher, donc il faut faire attention à la provenance. Il est également intéressant de savoir qui possédait les pièces auparavant. Vous ne les achetez pas à cause de la publicité ou du marketing - vous les achetez parce qu'ils ont une histoire, de sorte que le propriétaire d'origine peut également expliquer pourquoi vous les aimez. C'est beau de pouvoir le savoir. Donc mon conseil, ne payez pas trop cher, vérifiez la rareté, sachez d'où ça vient et tombez amoureux. C'est agréable d'attendre une pièce pendant 20 ans. Un jour, vous la verrez dans une vente aux enchères et vous ferez n'importe quoi pour l'avoir.

Votre plus belle trouvaille?

Un miroir de sol triptyque des années 1920 de Louis Sognot. Il peut également être utilisé comme écran. Je sais que je ne le vendrais jamais. C'est tellement simple et parfait - c'est tout ce que j'ai toujours voulu. J'ai trouvé un Hermès Kelly noir de 32 centimètres de la même année que ma naissance, que j'ai trouvé super mignon et émouvant. C'est un cuir très lisse et élégant et il est livré avec une bandoulière, ce qui est génial car je porte principalement des sacs à bandoulière. J'aime la possibilité de le porter de manière plus décontractée.

Quel est votre achat le plus récent?

J'ai dépensé beaucoup d'argent quand j'étais à Los Angeles il y a quelques mois. J'ai acheté un plateau en verre Jean Luce des années 30, beaucoup d'ensembles jupe et chemisier des années 70 et de belles lunettes vintage, très 70, très Monica Vitti. Je cherchais ce style depuis très longtemps.

Quelle est la pièce qui vous a échappé?

Oh mon dieu, il y en a tellement vous n'en avez pas idée ! Il y a une pièce que je regretterai toute ma vie. Chaque fois que je la vois en photo, je me dis pourquoi, pourquoi ne l'ai-je pas achetée?

Que reste-t-il sur votre whishlist?

Côté vêtements, je souhaite investir dans de beaux costumes inspirés du vestiaire masculin des années 80 et 90, comme des costumes bleu marine à bretelles, par exemple. Celui que porterais une fille très active à New York. Je recherche beaucoup de pièces Alaïa, et j'adorerais collectionner Hermès par Margiela et Jean Paul Gaultier des années 90 et début des années 2000.

Pour les intérieurs, je suis toujours à la recherche d'Otto Prutscher. Il est viennois et a conçu des verres incroyables et magnifiques. J'en veux des très particuliers - ils sont entièrement transparents - donc je suis toujours à la recherche de ceux-là parce que j'aime la verrerie et les cristaux. Je suis aussi à la recherche d'une belle pièce de Jean Boris Lacroix — je veux une lampe à poser ou un beau cendrier — mais je n'ai pas encore eu le coup de foudre.

mots confiés à Zoe Ruffner

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